Quelles évolutions dans le rapport au travail et au management depuis 2 ans ?
Le monde change, bousculé par les crises sanitaires, sociales, climatiques, morales…
Depuis 2 ans, particulièrement avec la crise Covid, de nombreuses études se sont penchées sur les conséquences de ces évolutions de fond auxquelles nous sommes confrontés.
Nous intéressant plus particulièrement ici à la sphère professionnelle, nous avons parcouru de très intéressantes enquêtes de la Fondation Jean Jaurès et vous en livrons quelques extraits intéressants à réfléchir.
Dans le rapport au travail, 2 changements majeurs :
• le travail, sa place, son sens vivent des bouleversements considérables avec des répercussions sur le management, l’organisation du travail et le rapport à l’entreprise
• la place de la famille et de la sphère privée, la santé (avec attente que l’employeur s’en préoccupe plus en prévention) et le logement ont pris une place au moins aussi importante que le travail dans la vie des gens et c’est nouveau
A la fin du 2ème confinement, 58 % des salariés affirmaient que la crise sanitaire avait changé leur rapport au travail et 79 % des cadres dirigeants considéraient que leur entreprise avait un rôle important à jouer au sein de la société, au-delà de son activité économique (un constat partagé par 71% de salariés).
Ces éléments sont intéressants à regarder quant aux valeurs et motivations des salarié.es aujourd’hui, car ces dimensions étaient nettement moins présentes avant ces crises.
Aujourd’hui, le travail n’occupe plus une place structurante dans la vie des Français :
Le travail n’a plus la fonction statutaire qu’il avait pour les générations précédentes. L’envie de bien-être au travail, de sens, de valeurs incarnées et partagées, et d’épanouissement est bien plus présente aujourd’hui pour tous, et notamment chez les plus jeunes qui ne sacrifieront pas leur vie à la « valeur travail » comme l’ont fait leurs parents.
Les attentes prioritaires des salarié.es sont d’ordre qualitatives, avec des attentes fortes concernant leurs conditions de travail, et une envie de travailler différemment.
Autre changement majeur : la fin du salarié qui ne compte pas ses heures !
En 2008 (*), 62 % des salarié.es affirmaient préférer gagner plus d’argent au détriment du temps libre : aujourd’hui 61 % des salarié.es français préfèrent désormais gagner moins d’argent, mais avoir plus de temps libre. L’attente de flexibilité organisationnelle et de souplesse dans les organisations est très en hausse, et pour les jeunes générations il n’y a pas de sens à donner plus que le temps prévu au contrat. Ils ont une vie à côté !
Pour autant, les enquêtes (*) montrent que cela ne signifie pas la fin de l’engagement : 77% des salariés estiment faire plus que ce qu’on leur demande et le faire volontiers mais avec moins de motivation, conséquence d’une frustration quant à la reconnaissance perçue de son travail au quotidien (42% ont le sentiment que leur manager ne s’en rend pas compte) et d’une difficulté à se projeter chez son employeur (efforts d’attractivité mais pas de fidélisation)
Le rôle central du manager
67% des salariés se disent satisfaits du management de proximité contre 51% de satisfaits concernant l’échelon de direction (DG, CODIR) (barrière hiérarchique et spatiale, manque d’interactions).
Le manager continue de jouer un rôle important même si les aspirations d’aujourd’hui poussent vers un management plus libérant que contrôlant (plus d’autonomie, de liberté, de confiance) , et plus collaboratif (être partie prenante dans les décisions, coconstruire plutôt qu’appliquer du descendant).
Les salariés attendent particulièrement du lui :
– renforcement de son rôle de proximité : organisation du travail, moyens, communication, liens
– « mutation » en manager « psychologique » : savoir détecter, prévenir les difficultés, et aborder l’état émotionnel
– Individualisation des liens
Il doit favoriser :
– une bonne intégration de chacun au sein des équipes (constat partagé par 86 % des salariés),
– la solidarité, le soutien (pour 74 % des salariés),
– l’auto-organisation, travail et temps » (pour 73 % des salariés)
– la possibilité de prendre des décisions par soi-même (pour 71% des salariés) en accordant le droit à l’erreur
Les qualités souhaitées pour ce manager d’aujourd’hui :
∙ Leadership, motivation, reconnaissance (en1er)
∙ Capacité à déléguer (78 % des salariés) et à décider (pour 75 %)
∙ Ecoute (72 %), solidarité (71 %) et capacité à générer un climat de confiance (67 %)
∙ Aptitude à définir clairement les objectifs de chacun (69 %), à bien organiser le travail (64 %) et à bien relayer l’information au sein de l’équipe (64%)
∙ « Coach / servant leader» (39 % des interviewés), loin devant « gestionnaire » (22 %) et «superviseur » (17 %)
La capacité à donner des signes de reconnaissances est le talon d’Achille des managers en France, il est attendu en matière de reconnaissance :
– la reconnaissance du droit à l’essai et à l’erreur (59 %),
– l’encouragement à la prise d’initiatives individuelles ou collectives (55 %)
– les retours d’expérience pour valoriser ou faire progresser les collaborateurs (52 %)
– la valorisation des efforts et les résultats (46 %)
– la célébration des succès (40 %)
Le développement d’une culture managériale plus démocratique est un élément clé dont les entreprises doivent rapidement se saisir en réponse à plusieurs enjeux :
1) être en mesure de répondre à l’aspiration des salariés à une plus grande autonomie dans l’organisation du travail et la priorité qu’ils accordent à la recherche de sens dans leur activité quotidienne
2) développer l’engagement, l’innovation, la performance collective en sortant des logiques de process et reporting à outrance qui sclérosent l’action et l’innovation
3) fidéliser les talents : Pouvoir se projeter dans d’autres métiers, s’investir dans d’autres champs que son métier (actions RSE par exemple), être acteur des politiques internes
Une réponse avec les nouveaux modes de management et d’organisation ?
Depuis 2010, de nouveaux modèles s’installent au cœur des organisations : Le lean , les méthodes agiles, l’entreprise libérée, l’holacratie, la gouvernance partagée, les organisations opale ou encore les sociétés à mission.
La finalité de ces nouvelles modalités est de faire fonctionner une organisation d’une manière dynamique et agile afin qu’elle soit performante et adaptable dans un environnement complexe et changeant tout en préservant le capital humain.
L’accent est mis sur le travail en équipe, l’enrichissement et l’élargissement des tâches (apprentissage & motivation), l’auto-organisation de groupes restreints, la subsidiarité dans les prises de décision, la discussion collective, le management de soutien professionnel, etc. Il en découle des constats positifs en matière de :
– développement de l’autonomie et de l’auto-responsabilité
– meilleur climat de confiance,
– coopération,
– motivation et engagement.
La finalité de ces nouvelles modalités est de faire fonctionner une organisation d’une manière dynamique et agile afin qu’elle soit performante et adaptable dans un environnement complexe et changeant, tout en préservant le capital humain.
Face à ces changements profonds dans le rapport au travail, déployer ces nouvelles modalités semble être une des réponses les plus adaptées au contexte actuel.
Notre expérience d’accompagner des organisations qui engagent ces transformations nous montre qu’il n’existe pas de modèle parfait ou meilleur que l’autre : il appartient à chaque organisation de puiser dans ces modèles et les adapter à sa situation propre car ils conviennent aussi bien aux TPE, PME, grands groupes, collectivités, associations, quel que soit le secteur.
Ces modalités, au plus près des besoins du terrain, s’avèrent plus respectueuses des parties prenantes, offrent la possibilité de mieux répondre aux attentes des salariés et aux impératifs urgents des enjeux RSE tout en accroissant les capacités d’innovation, de souplesse et de réactivité si nécessaires au monde d’aujourd’hui !
(*)source : études Fondation Jean Jaurès